Phytoprotection
Biosurveillance, Entomologie, Phytopathologie

Ver-gris occidental du haricot et mycotoxines: Impact de l’insecte et de son contrôle sur la salubrité du maïs et les risques pour la santé animale.

Résumé vulgarisé

Le maïs est l’une des principales productions agricoles au Québec. Il se retrouve tant dans la consommation humaine que dans celle du bétail. Cette culture est toutefois la cible de plusieurs insectes ravageurs et de maladies qui peuvent même co-exister sur une même plante. C’est notamment le cas du ver-gris occidental du haricot (VGOH), un papillon dont la chenille s’attaque aux épis du maïs et des champignons du genre Fusarium qui sont responsables des fusarioses. Les dommages causés par l’insecte constituent une porte d’entrée pour les champignons pathogènes qui en se développant, peuvent produire des toxines qui sont nocives pour la santé du bétail. Une bonne gestion de l’insecte et du pathogène peuvent permettre de contribuer au bien-être animal. Au Québec, on connaît encore peu de choses sur l’impact du VGOH, de son contrôle et des pratiques agricoles sur la production des toxines. Ce projet devrait nous permettre d’en apprendre plus sur les interactions entre le VGOH, les Fusarium, les toxines et comment une bonne gestion peut être bénéfique pour le bétail.

Crédit photo : Julien Saguez

Résumé scientifique

Le maïs constitue l’une des principales productions agricoles au Québec. Le maïs grain et le maïs ensilage sont utilisés majoritairement pour l’alimentation du bétail, alors que le maïs sucré est destiné à la consommation humaine. Le maïs est la cible de plusieurs insectes ravageurs et de maladies. Dans certains cas, il peut y avoir une combinaison des différents ennemis des cultures.
Le ver-gris occidental du haricot (VGOH), un papillon dont la chenille s’attaque aux épis du maïs, figure parmi les insectes ravageurs les plus problématiques pour le maïs En plus de causer des dommages directs (consommation de grains), cet insecte nuit à la qualité des épis puisqu’il creuse des trous, forme des galeries et dépose ses excréments. Ces dommages directs peuvent être une porte d’entrée pour le développement de champignons pathogènes. C’est notamment le cas des champignons du genre Fusarium qui sont responsables des fusarioses. Ces champignons peuvent produire plusieurs centaines de mycotoxines, les plus importantes étant le Deoxynivalenol (aussi connu sous le nom de DON ou vomitoxine), la T-2 / HT-2, et la zéaralenone. Ces mycotoxines peuvent avoir des conséquences graves sur le bétail et l’humain qui s’alimentent du fourrage ou de grains contaminés. Cela engendre aussi des augmentations de coûts pour les producteurs (frais de vétérinaire pour soigner le bétail, utilisation de médicaments ou de produits pour baisser les taux de mycotoxines) et des pertes de rendement et de productivité. Chez les bovins, on peut observer des problèmes digestifs, mais aussi des pertes de production laitière. Chez les porcs, qui sont extrêmement sensibles aux mycotoxines, on peut observer un arrêt de la prise alimentaire, un arrêt de la croissance et des problèmes digestifs et immunitaire. Chez la volaille, la ponte peut être réduite et la production de chair peut diminuer. L’Agence Canadienne d’Inspection des Aliments (ACIA) fixe des taux maximums de mycotoxines dans les rations alimentaires. Tous les problèmes liés à la santé du bétail peuvent induire une augmentation des coûts de production. Indirectement cela peut avoir un impact sur le consommateur qui recherche de plus en plus de viande provenant de bétail élevé sans antibiotique. Plusieurs facteurs agroenvironnementaux (ex: année, site, zone UTM, conditions météos) peuvent influencer les taux de mycotoxines présentes dans le grain. L’une des façons de contrôler le développement des mycotoxines et de favoriser la santé animale est de réduire les risques directement dans le champ, notamment en limitant la pénétration et le développement du champignon dans les épis. Comme le VGOH est un insecte qui peut grandement augmenter les risques de propagation de des fusarioses et le développement de mycotoxines, son contrôle est primordial. Différentes méthodes de lutte sont actuellement disponibles pour lutter contre le VGOH et les fusarioses dont l’utilisation de pesticides de synthèse, d’hybrides avec la technologie Bt Viptera ou d’ennemis naturels tels que les trichogrammes. L’impact du VGOH, de son contrôle et des pratiques agricoles sur la production de mycotoxines est peu connu au Québec. Il convient donc de dresser un portrait québécois de la situation et de déterminer si les méthodes de contrôle de cet insecte et/ou certaines pratiques agricoles permettent de réduire la production de mycotoxines et ainsi de réduire les risques sanitaires.

Objectifs

OBJECTIF PRINCIPAL:
L’objectif du projet est de dresser un portrait actuel des mycotoxines, dans les différentes cultures de maïs, à travers différentes régions du Québec en évaluant comment le VGOH et sa gestion ont un effet sur la production de mycotoxines et en déterminant si les méthodes de lutte actuelles et certaines pratiques agricoles permettent de réduire les risques que les mycotoxines se développent, d’améliorer la salubrité du maïs et de réduire les risques pour la santé animale et humaine.

OBJECTIFS SPÉCIFIQUES:
– Évaluer le niveau de contamination des épis par le VGOH et par les champignons pathogènes et déterminer si les fusarioses sont présentes sur d’autres parties de la plante, notamment sur les tiges du maïs.
– Établir si des mycotoxines sont présentes dans le maïs et à quels taux, notamment en collectant des épis sains ou infestés par le VGOH et des échantillons de maïs (ensilage, grains ou sucré), prélevés au moment de la récolte, à la sortie de la batteuse ou de l’ensileuse.
– Évaluer les risques pour le bétail pour des champs dans lesquels il y a un contrôle du VGOH et des champs dans lesquels l’insecte n’est pas contrôlé.
– Compiler toutes les données collectées dans une base de données (incluant les facteurs agroenvironnementaux), afin de dresser un portrait de la présence et les taux de mycotoxines dans les différentes régions du Québec afin de suivre leur évolution à long terme.
– Analyser la base de données afin de déterminer si certaines pratiques culturales et méthodes de luttes utilisées contre le VGOH et les fusarioses semblent associés à une réduction de la production de mycotoxines et des risques sanitaires.
– Informer les producteurs des résultats obtenus et des pratiques permettant de réduire la présence des mycotoxines afin d’améliorer la santé animale.

Crédit photo : CÉROM

Domaine : Phytoprotection
Spécialité : Biosurveillance, Entomologie, Phytopathologie
Porteur de projet : Julien Saguez
Collaborateur(s) interne(s) : Tanya Copley
Collaborateur(s) externe(s) : Alltech, Producteurs de Lait du Québec, Producteurs de Porcs du Québec, Producteurs de légumes de transformation du Québec
Source de financement : MAPAQ — Programme Innovation bioalimentaire – Volet 2 et collaborateurs
Durée : 2025-2028
Culture : Maïs
Pays : Canada
Régions : Outaouais, Montérégie Est, Montérégie Ouest, Mauricie, Estrie, Chaudière-Appalaches, Laurentides
Statut : En cours

GALERIE PHOTOS

PROJETS

Le ver-gris occidental du haricot (VGOH) est un papillon dont les larves s'attaquent principalement aux cultures de maïs (grain, ensilage et sucré). Il est difficile de lutter contre cet insecte puisque les larves (des chenilles) s'attaquent aux épis et que peu de méthodes sont actuellement disponibles. Les trichogrammes sont des micro-guêpes qui peuvent parasiter les œufs de plusieurs espèces de papillons ravageurs. Ils sont utilisés comme agents de lutte biologique dans plusieurs cultures fruitières et maraîchères, ainsi qu’en foresterie. Au cours des dernières années, nous avons démontré que les trichogrammes peuvent parasiter les œufs de VGOH. Dans certaines cultures, des trichocartes sont utilisées pour effectuer la lutte biologique. Mais l'utilisation de trichocartes n'est pas une méthode viable pour de grandes superficie. Les drones sont une technologie innovante pour faire de l'épandage de trichogrammes dans les champs. Cette méthode a déja été testée pour lutter contre la pyrale du maïs. Le projet vise donc à tester différentes méthodes d'épandage (en vrac ou en capsules) pour évaluer si cette technologie est efficace et rentable pour contrôler le VGOH. les populations de ver-gris occidental du haricot (VGOH) (Lepidoptera : Noctuidae). Des masses d’œufs avaient été collectées dans différents champs de la province pour déterminer s’il existe un parasitisme naturel et si oui, par quelle(s) espèce(s). Des essais préliminaires avaient également été réalisés en champ en effectuant des lâchers inondatifs de trichogrammes à l’aide de trichocartes sur de petites superficies. Les résultats avaient montré que les masses d’œufs peuvent être parasitées par diverses espèces de trichogrammes, mais naturellement c’est l’espèce T. minutum qui semble être la meilleure candidate pour contrôler le VGOH puisque quasiment 100% des masses d’œufs de VGOH étaient parasitées par cette espèce (Saguez, 2024). Bien que les trichogrammes soient efficaces contre les œufs de VGOH, il serait peu réaliste d’installer manuellement des trichocartes sur de grandes superficies de maïs grain ou ensilage ni même dans du maïs sucré destiné à la transformation. Il existe d’autres méthodes qui peuvent être envisagées pour les grands champs, parmi lesquelles la dispersion des trichogrammes par avion, à l’aide de drones (dispersion en vrac ou via des capsules) ou en utilisant des pulvérisateurs. Des études récentes ont été menées au Québec sur la pyrale du maïs et la tordeuse des bourgeons de l’épinette, avec l’utilisation de drone pour libérer des trichogrammes (Martel et al. 2021). Les résultats de ces travaux ont montré un parasitisme plus élevé des masses d’œufs de pyrale et de tordeuse dans les zones traitées par drone que dans les zones témoin. Cette étude a également montré que la synchronisation de l’épandage et le temps d’exposition des œufs sont des facteurs clefs dans le succès de la méthode. Une autre étude a également été effectuée par l’Université Laval à l’aide d’un pulvérisateur installé sur un véhicule tout terrain (Dionne, 2019). En 2021, un épandage par drone de trichogrammes en vrac sur vermiculite avait été réalisé dans deux champs et les résultats avaient indiqué une réduction des dommages liés au VGOH dans les sections traitées avec des trichogrammes comparativement au témoin (Saguez, non publié). Le présent projet qui s’est déroulé au cours des saisons 2022 à 2024 visait à confirmer l’efficacité des différentes méthodes d’épandage de trichogrammes pour le contrôle du VGOH.
Piège-fosse à phéromone pour taupins
épis de blé
Les maladies foliaires peuvent engendrer des pertes de rendement significatives pour les producteurs de blé, se traduisant par des pertes de rendement annuelles entre 5 % et 44 %. La méthode la plus fréquente pour réduire les pertes associées aux maladies foliaires du blé est l’utilisation de fongicides foliaires. Selon des données de l’Allemagne, l’utilisation de fongicides foliaires peut réduire les pertes de rendement associées aux maladies foliaires de 12 %. Par contre, l’utilisation non justifiée de fongicides foliaires représente non seulement des coûts non négligeables pour les producteurs, mais aussi potentiellement des effets néfastes pour l’environnement, la santé humaine et des animaux, et éventuellement l’efficacité des fongicides foliaires via le développement de résistance aux fongicides. L’utilisation raisonnable et durable des fongicides foliaires est donc nécessaire, surtout dans un contexte où les changements climatiques risquent d’augmenter la fréquence des épidémies, de précipiter l’arrivée de maladies, ou d’en introduire de nouvelles au Québec. La lutte intégrée des ennemies de culture et l’utilisation raisonnable et justifiée des fongicides foliaires sont donc des pratiques obligatoires faces aux changements climatiques afin d’assurer une production durable et rentable pour les producteurs. L’utilisation de cultivars résistants est souvent considérée comme la première ligne de défense contre les maladies, en plus de représenter un moyen rentable et durable pour combattre les maladies agricoles, et plusieurs études démontrent que les pertes de rendement sont hautement corrélées avec le niveau de résistance d’un cultivar, avec moins de pertes quand un cultivar résistant est utilisé . Le seuil de control, c’est-à-dire le niveau d’infection dont une application de fongicide foliaire est efficace, rentable et justifiable, peut varier selon le stade d’infection, la maladie, et le niveau de résistance d’un cultivar. Bien que les seuils d’intervention actuels au Québec soient basés sur un seuil de 5 % de la feuille étendard ou les feuilles du haut, les applications systématiques à certains stades phénologiques demeurent une pratique courante. Klocke et al. (2023) ont démontré qu’une intervention de « situation », basée sur le niveau de résistance d’un cultivar contre différentes maladies et l’utilisation d’un cultivar multirésistant peut réduire l’indice de fréquence des traitements de fongicides foliaires par 80 %, comparé à des applications basées sur le stade du cultivar sans prendre en compte le niveau de résistance ou la sévérité de la maladie. Ce projet vise à démontrer que les seuils d’intervention recommandés sont fiables et que les applications de fongicides foliaires ne sont justifiées que lorsque ces seuils sont atteints et si les conditions météorologiques favoriseront le développement continue de la maladie. Le but du projet est de comparer l'efficacité relative de l'utilisation de la résistance génétique pour lutter contre les maladies afin de réduire l'utilisation des pesticides dans le blé.

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